Dans un monde aux possibilités infinies vivait une petite fille aux yeux brillants. Son rêve, limpide comme de l’eau, était de monter à cheval et de galoper librement. Du matin au soir, elle se visualisait tant et si bien qu’elle s’y croyait presque.
Un jour, elle découvrit dans sa cour un magnifique carrousel. Il était si beau avec tous ces chevaux se tenant bien droits. Timidement, elle s’en approcha. La timidité fut vite chassée par l’envie irrésistible d’y monter juste pour faire un tour.
Elle choisit donc un cheval au hasard et pris place avec un empressement incontrôlable. Aussitôt, la musique se fit entendre et le manège s’activa comme par magie. Bien agrippée au poteau doré de sa monture, elle se sentait soudainement en sécurité.
Or, ce qui devait être juste un tour devint rapidement une habitude. Au fil du temps, elle finit même par avoir un cheval préféré. Le carrousel tournait et tournait inlassablement, confortant la petite fille dans un scénario rassurant.
Voyant son intérêt grandissant et la passion qui l’habitait pour l’univers des chevaux, ses parents finirent par lui faire la surprise de lui offrir un véritable petit cheval. Émerveillée, la petite fille oublia momentanément le carrousel et sa magie.
Toutefois, lorsqu’elle comprit que monter un véritable cheval demandait du travail et de la persévérance, les choses se compliquèrent. Après quelques tentatives infructueuses, elle courut trouver refuge dans son carrousel. En fait, plus elle essayait sans succès, plus elle y retournait rapidement. Certes, son cheval était magnifique, mais c’était si facile de cette façon! À chaque fois qu’elle y revenait, la musique l’enveloppait et le mouvement l’apaisait.
Il lui arrivait d’avoir des regrets. Oh rien de bien important! Juste un petit pincement au coeur de rien du tout qui était rapidement balayé sous le bien-être instantané que lui procurait son retour dans le carrousel.
Il en fut ainsi pendant des années. Le véritable petit cheval dû partir faute d’avoir une cavalière avec qui faire équipe. Ce n’est pas sans peine que la petite fille le regarda s’éloigner en s’agrippant à son carrousel comme si une force incontrôlable la retenait: Elle venait de passer à côté de son rêve.
Pour la première fois, elle se sentit coincée dans son carrousel. Pas trop, juste un peu. Son esprit étant habitué au plaisir de s’y retrouver, elle cumula sans broncher plusieurs moments d’inconfort. Tant et si bien qu’elle finit par les porter dans un immense bagage qui lui pesait de plus en plus. Ce qui était jadis rassurant était désormais source de frustration, mais ne savait plus comment l’arrêter. Le carrousel était tout ce qu’elle connaissait et il lui était si simple d’y revenir juste pour un tour et le plaisir immédiat qu’il lui procurait.
Et pendant qu’elle tournait malgré le poids des inconforts, elle ne remarqua pas un petit détail qui aurait pu faire toute la différence: Un panneau de contrôle munit d’un gros bouton rouge tellement voyant qu’il était étonnant qu’elle ne l’ait jamais remarqué. Si elle l’avait vu, elle aurait su que, depuis tout ce temps, elle seule avait le pouvoir de tout arrêter.
Elle ne savait pas non plus que, quelque part non loin, galopait un petit cheval devenu grand qui ne cessera jamais d’attendre sa cavalière.
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